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EUROPE GRÈCE ET LA SOLIDARITÉ AVEC LES MIGRANTS
vendredi 19 février 2016
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collectif de soutien au peuple grec
journal collectif n°4
février mars 2016 [1]
LA FORTERESSE EUROPE |
La majorité des réfugiés arrivent dans les îles grecques de la mer Égée en passant par la Turquie. Et voici la Grèce accusée par les institutions européennes de « déficiences sérieuses » pour le contrôle de sa frontière turque.
Sous ce prétexte, elle est menacée d’être exclue de la zone de Schengen. La boucle est bouclée. La guerre qui crée des migrants permet aussi à l’UE de faire du chantage aux pays européens les plus en difficulté, en premier lieu desquels la Grèce.
L’UE feint d’espérer que la Grèce pourrait servir de lieu d’accueil pour les réfugiés, qu’elle pourrait maîtriser ses frontières, tout en exigeant qu’« elle s’ajuste financièrement » pour pouvoir rembourser ses créanciers.
L’asphyxie permettra vite une nouvelle menace de sortie de l’Euro ?
L’EXODE |
La catastrophe s’étale dans tous les journaux du monde : « Plus de 3 800 personnes sont mortes l’an dernier en tentant de traverser la Méditerranée. »...
Les médias et les dirigeants des États européens versent des larmes de crocodile devant le corps sans vie d’un petit garçon sur le sable. Les pleureuses de tout poil se répandent sur le sort de ces « pauvres gens victimes de passeurs criminels ».
Les télévisions nous montrent les images des rescapés qui errent dans le plus grand dénuement dans une Europe enneigée.
Mais, après ces douloureux périples, où échouent-ils ? Il restent dehors dans le froid ou dans des camps prisons ou des camps comme Calais qui ne sont rien d’autre que des bidonvilles où survivent plus de deux mille personnes et dans lesquels on condamne à passer l’hiver des enfants transis de froid.
Puis changement de ton. L’un après l’autre, les pays européens ferment leurs frontières aux émigrés. Fini Schengen ! « On ne peut accueillir toute la misère du monde. » La France « terre d’asile » n’a pas un meilleur comportement, elle n’a accueilli que quelques centaines de ces réfugiés.
Alors, pourquoi ces gens risquent-ils leur vie ? Qui sont ces migrants ? Pourquoi ont-ils quitté leur pays ? Pour fuir la guerre et la misère qui en découle. Parce que chez eux, depuis des années, ils prennent des bombes sur la tête. Dans tous les médias, on nous montre ces villes éventrées de Syrie, d’Irak, mais on prend bien soin de ne pas souligner le lien entre la question de l’immigration et celle de la guerre.
On accuse à juste titre le boucher Assad et l’État russe mais lorsque les USA ou le président Hollande lâchent des bombes sur les villes de ces pays, combien de morts ? On fait état de quelques djihadistes exécutés !
Et la population civile, que fait-elle ? On ne sait pas ? Si, on sait ! Elle fuit les villes sous les bombardements. Ceux qui ont pu rassembler suffisamment d’argent (les moins nombreux) tenteront la traversée de la Méditerranée pour 5 000 € ou plus, les autres resteront dans les ruines de leur maison ou fuiront par milliers vers des camps.
Ces colonnes d’hommes de femmes et d’enfants rappelle les images qu’on a pu voir de « l’Exode » en France et en Europe lors du déclenchement de la guerre de 1939-1945.
Par ses guerres, l’Europe est la principale cause de ces migrations. Au lieu de pourchasser ces malheureux émigrés, mieux vaudrait stopper le système qui les pousse à partir de chez eux : la guerre.
Rappelons-nous la Libye. Les USA, l’UE et la France de Sarkozy ont détourné la demande d’aide au peuple qui se révoltait contre le boucher Kadhafi pour lancer une opération militaire de grande ampleur sous le drapeau de l’OTAN.
L’autre raison qui a aussi poussé des milliers de gens sur les routes, c’est la politique commerciale agressive menée par l’UE qui exige depuis des années des États africains qu’ils se convertissent au libre échange total. Cela a empêché le développement local et déstructuré des pans entiers de l’économie locale.
C’est pourquoi la distinction entre migrants relevant de l’asile politique et migrants
économiques n’a pas de sens car, dans les deux cas, les responsables sont les
grandes puissances.
Certains médias et politiciens, pour mieux faire des réfugiés des boucs émissaires, nous incitent à relier toutes les actualités autour de l’intensification des flux migratoires. Comme si nous devions voir dans les réfugiés des terroristes ou des violeurs en puissance, comme si leur rejet pouvait nous protéger des violences que nos sociétés produisent elles-mêmes en leur sein.
Pourquoi les criminels qui déclenchent les guerres et la souffrance des populations, les criminels qui déclenchent la mort dans nos pays par les politiques d’austérité ne seraient-ils pas condamnés et punis ?
Les bureaucrates européens sont entièrement responsables de la mort de plus de 3 800 personnes en Méditerranée (chiffres de décembre 2015), car ils refusent de proposer « des alternatives légales et sûres à la traversée mortelle de la mer », ce qui a poussé plus d’un million de personnes dans les bras des passeurs et dans des bateaux surpeuplés.
En revanche, l’UE n’intervient pas quand certains pays décident unilatéralement et de manière irresponsable de fermer les frontières.
C’est cette politique qui porte atteinte à la santé, à la vie et la dignité des migrants. Bien sûr, des associations courageuses suppléent aux défaillance de l’Europe et sauvent les migrants de la noyade. Cela ne plaît pas à tout le monde et certains membres d’associations sont même arrêtés.
Qu’a proposé l’Europe pour remédier à cette misère ? La création et aujourd’hui le renforcement de Frontex, ce corps européen de gardes-frontière destiné non pas à sauver les réfugiés fuyant la guerre et les bombardements mais à rendre moins perméables les frontières de l’Europe. Il peut agir sur le territoire d’un État membre sans son accord. Aujourd’hui, ils sont 402, et devraient passer progressivement à 1 000, plus 1 500 réservistes mobilisables en trois jours.
Ce projet d’augmentation du nombre de Frontex est un moyen pour les puissances du centre de l’Europe (en premier lieu la France) de se doter d’un bras armé dans le sud de l’Europe (principalement en Grèce et Italie) sans se salir les mains.
Dans le dernier projet en date, Frontex pourrait même renvoyer les réfugiés dans leur pays d’origine grâce à la mise en place d’ « un bureau de retour ».
MIGRATIONS : |
Quelle est la réalité des chiffres sur les flux migratoires ?
D’après le programme des Nations unies pour le développement, il y aurait 200 millions de migrants internationaux, soit 3 % de la population mondiale, pourcentage qui est resté stable ces cinquante dernières années.
Seuls 7 % des migrants dans le monde (soit 15 millions de personnes) sont des réfugiés, les autres vivent dans des régions voisines de leur pays d’origine. Le nombre de réfugiés n’est pas plus important que celui que provoqua la guerre des Balkans dans les années 1990.
La grande majorité des réfugiés gagnent les pays frontaliers. Seuls 14% d’entre eux se dirigent vers les pays européens.
Ainsi, au Liban il y a 209 réfugiés pour mille habitants, tandis qu’en France il y en a 50 pour mille.
Les chiffres sont donc instrumentalisés par certains politiques ou médias, et il faut les considérer avec circonspection, d’autant que les agences comme Frontex, qui publient le nombre d’entrées de réfugiés en Europe, ont reconnu qu’elles pouvaient les compter en double.
Reste un chiffre qui devrait tous nous interpeller : près de 4 000 morts en Méditerranée en 2015.
D’EVROS À CALAISEN PASSANT PAR LAMPEDUSA ET ISTANBUL : SOLIDARITÉ AVEC LES MIGRANTS |
Initié par le Mouvement contre le racisme et la menace fasciste, en coordination avec une coalition internationale pour la défense des réfugiés, la mobilisation des 23 et 24 janvier a prôné l’ouverture des frontières partout en Europe pour un digne accueil de tous ceux qui risquent leur vie pour la sauver, victimes de la misère et de la guerre.
La responsabilité des puissances impérialistes qui bombardent la Syrie et poussent des millions de personnes vers l’exil est clairement mise en jeu.
L’appel grec organise un rassemblement à la frontière gréco-turque près du mur d’Evros dont il exige le démantèlement. En effet, c’est cette clôture d’Evros qui, barrant la route terrestre vers la Grèce et donc vers l’Europe, oblige les migrants et leurs familles à embarquer sur de fragiles canots en payant des prix exorbitants afin d’accoster les îles grecques proches des côtes turques.
Les corps inertes d’adultes et d’enfants sont recueillis chaque jour dans les eaux glacées de la mer Égée.
Pour en finir avec ce crime massif de non-assistance à personne en danger, cet appel clame haut et fort la disparition de la clôture d’Evros.
SOLIDARITÉ DANS LES ÎLES GRECQUES : |
800 000 réfugiés fuient les pays en guerre par la Turquie, soit 75 % des réfugiés arrivés en Europe. L’aide financière européenne (80 millions d’euros, soit moins de 100 euros par migrant) est largement insuffisante compte tenu de la situation socio-économique catastrophique du pays (26 % de chômage, un tiers des familles en situation de sous-nutrition, selon le gouvernement).
Face aux immenses besoins humanitaires et à la pénurie des structures d’accueil sur les îles, seule la forte mobilisation de la population permet d’apporter aux réfugiés une aide humanitaire d’urgence.
Des bénévoles locaux et internationaux s’investissent dans des dispensaires sociaux autogérés, collectent et distribuent des tentes et des repas, ou organisent des opérations de secourisme sur des bateaux de pêche.
Certaines de ces organisations ont dû interrompre leur action faute d’aide financière des autorités, comme l’association des volontaires de Kos en août 2015.
Mais, depuis quelques semaines, l’agence Frontex (agence européenne de gestion des frontières extérieures), sous un discours officiel de coordination de l’aide aux migrants, effectue un contrôle et un fichage des bénévoles.
Confrontées à la menace d’une exclusion de l’espace Schengen, les autorités grecques collaborent à cette opération et ont déjà procédé à plusieurs arrestations de volontaires internationaux, accusés d’aide à l’entrée illégale d’immigrants.
Après la violence croissante des sanctions économiques imposées par l’Europe, et dans un pays au passé dictatorial pas si lointain, ces mesures ont une résonance particulière. Partagés entre colère et inquiétude, les habitants tentent de continuer leurs actions et s’organisent pour soutenir les volontaires arrêtés.
Face à l’image médiatique d’une population européenne réticente à l’accueil des réfugiés et l’argument d’un « seuil de saturation », y compris en Europe de l’Ouest, ces initiatives locales rappellent que l’engagement solidaire et humanitaire ne dépend ni du nombre de réfugiés accueillis, ni des conditions économiques.
Mais, au-delà même de la situation des réfugiés, la pression des autorités européennes, qui tentent de réprimer ces initiatives populaires, questionne de manière inquiétante les soi-disant valeurs démocratiques de l’Union Européenne
L’aide apportée par les Dispensaires Sociaux et Solidaires est indispensable |
LE DISPENSAIRE SOCIAL ET SOLIDAIRE DE PERISTERI |
Durant la dernière semaine du mois d’août, des bénévoles, médecins et administratifs, des Dispensaires Sociaux Solidaires de Peristeri, de Corinthe et de Korydallos ont visité l’île de Chios afin d’offrir toute assistance possible aux réfugiés sur l’île.
Ce qu’ils y ont vu a été un « coup de poing dans l’estomac ».
Cette image, commune à toutes les îles frontalières qui reçoivent quotidiennement les vagues de réfugiés, est une honte pour la civilisation au XXIe siècle : des êtres humains dans une situation de grande misère, des enfants et des nourrissons dénutris, déshydratés, dans un réel état d’urgence.
Notre équipe a réussi à organiser deux dispensaires pour les enfants et pour les adultes, à les approvisionner en fournitures médicales de base et en eau potable, et à garantir des conditions sanitaires plus humaines (douches, toilettes chimiques).
L’aide reçue de la population locale était également importante en ce qui concerne la nourriture, l’eau potable et les vêtements.
La seule dissonance dans cette image de solidarité a été l’absence notable de l’Église.
Enfin, nous avons contacté l’association médicale locale et avons discuté des moyens pour que cet effort se poursuive après notre départ.
Nous tenons à souligner l’importance de notre expérience dans des circonstances si particulières et difficiles. Cette expérience constitue un héritage pour l’avenir. Chaque jour, nous constatons que la vague de solidarité et l’accueil chaleureux des habitants de nos îles et de bien d’autres vient adoucir la situation tragique de ces réfugiés.
Les quelques cas d’exploitation et d’escroquerie constatés ne peuvent pas altérer la force de ce grand effort de solidarité.
La même vague de solidarité se manifeste chez de nombreux peuples européens, à l’opposé de leurs gouvernements qui, en raison des guerres civiles qu’ils fabriquent ou fomentent, sont largement responsables du problème aigu des réfugiés aujourd’hui.
Ces gouvernements démontrent leur aversion pour cette valeur suprême qu’est la solidarité, révélant ainsi le cynisme de leur politique ou, dans le meilleur des cas, leur indifférence.
Malheureusement, sur les côtes grecques ne s’échouent pas seulement des corps inertes mais aussi une partie de notre culture européenne.
Le KIΑΛΛΗ (KIALLI) de Thermi |
Le dispensaire social solidaire (KIALLI) de Thermi applaudit vivement la décision de réouverture de la station de transition de réfugiés à Eidomeni. Notre diagnostic, après examens médicaux des réfugiés rencontrés à Eidomeni, est net : une partie significative de la population de réfugiés se trouve dans un état de fatigue avancée et d’épuisement.
Ces symptômes étaient encore plus évidents au sein des groupes vulnérables (nourrissons, enfants, femmes enceintes, personnes âgées).
L’exposition des réfugiés à des conditions de déplacement précaires dans la mer Égée a certainement un impact sur leur santé.
Les décès par hypothermie survenus à Skala Skamnias à Mytilène le confirment.
La souffrance éprouvée par les réfugiés lors de leurs longs trajets en autobus, la difficulté d’accéder à des toilettes (dans les aires de stationnement) et leur malnutrition induisent des risques graves pour la santé. Ces risques doivent être pris au sérieux par l’État.
Les difficultés de fonctionnement de la station à Eidomeni rendent la « gestion » des décès encore plus difficile. N’oublions pas que nous parlons de vies humaines.
Pour renforcer l’aide nécessaire face à cet état d’urgence, KIALLI a repris son action
à Eidomeni depuis le 23 janvier.
Le protocole d’action est similaire à celui de nos missions précédentes. Suite à une décision de la réunion des bénévoles, le KIALLI agira en synergie avec Eidomeni Oikopolis.
Soutenez KIALLI ! Nous avons besoin de médicaments, ainsi que de la participation de médecins, d’infirmières et d’autres bénévoles dans nos missions.
Dispensaire Social Solidaire (KIALLI) de Thermi
2e km de la rue Thermis Triadiou,
tél. (0030) 23 10 46 53 53 (10 h - 12 h et 17 h - 20 h de lundi à
vendredi).
E- mail : info@kiallithermis.gr, Site : www.kiallithermis.gr.
FACE AU PROBLÈME DES MIGRANTS, |
La crise des migrants est l’occasion pour les grandes puissances européennes de renforcer leur domination politique sur les États faibles de la périphérie méditerranéenne, notamment la Grèce.
L’Allemagne a réfléchi un temps à un échange inique : proposer à la Grèce de garder plus de réfugiés sur son sol contre un assouplissement du mémorandum.
Puis il a été reproché à la Grèce une mise en place trop lente des récupérations
d’empreintes digitales des réfugiés et migrants « illégaux ».
Le 3 décembre, sous la pression d’une exclusion de l’espace Schengen (espace intraeuropéen dit de libre circulation), la Grèce a été contrainte de demander à Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières de l’UE, le déploiement sur son territoire d’équipes « RABIT » (équipes mobiles d’assistance rapide), pour « mieux contrôler la mer Égée ».
Les menaces ont redoublé récemment pour que la Grèce ne se contente pas d’un seul hot spot, centres d’enregistrement et de tri des migrants (actuellement sur l’île de de Lesbos), mais en ouvre cinq.
On apprend enfin qu’Angela Merkel vient de faire miroiter à Alexis Tsipras qu’Athènes pourrait bénéficier d’une ouverture de discussions sur la restructuration de sa dette publique en échange d’un contrôle renforcé des flux migratoires.
En même temps qu’elle fait pression sur la Grèce, la Commission européenne a organisé un sommet en novembre 2015 pour négocier avec la Turquie, principal pays de transit des migrants syriens, la mise en place d’une politique visant à rendre ses frontières plus imperméables contre relance du processus d’adhésion à l’UE et promesse de versement financier (3 milliards), renforçant par là même le pouvoir des dirigeants de l’AKP (le parti au pouvoir) et leur stratégie de répression du peuple kurde.
La politique européenne à courte vue ne règle rien sur le fond et n’empêchera pas les populations civiles de fuir des conflits qui sont attisés par l’Occident pour des raisons impérialistes.
La priorité est bien de transformer l’Europe sur la base d’une véritable coopération entre les peuples et d’agir pour un règlement politique des situations de misère et de conflits qui accablent de nombreux pays notamment la Syrie.
[1] Le collectif unitaire de soutien au peuple grec (Paris 5e-13e)
Pour nous contacter :
aveclesgrecs.paris13@gmail.com
www.facebook.com/collectifparis13
[2] Le collectif Pour la Grèce Paris 13 soutient financièrement le Dispensaire Social et Solidaire de Peristeri.
Contact : aveclesgrecs.paris13@gmail.com https://www.facebook.com/collectifparis13