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ENTRETIEN AVEC REFA’T AS-SA’EED, MILITANT HISTORIQUE DE LA GAUCHE EGYPTIENNE

"Un printemps spontané suivi par un automne prolongé"

mardi 18 décembre 2012


« Nous ne devons pas nous considérer comme des héros qui guident les gens. Il est préférable de servir les humains en accord avec leur propre conscience, plutôt que nous servir. Je dis à mes camarades que nous ne voyageons pas ensemble pour descendre chacun à une station différente, mais nous continuons tous jusqu’au bout, jusqu’à la dernière station ». Avec ce concentré de politique et de sagesse morale qui imprègne son entretien avec « Avgi ». Refa’t as Sa’eed, militant historique et sénateur, président du parti de la Gauche parlementaire Taggamoo, était la semaine passée a Athènes. Il était invité de la Conférence Internationale sur les soulèvements du monde arabo-musulman, conférence organisée par le département d’Etudes Turques et Asiatiques de l’Université d’Athènes

Dans un entretien avec le quotidien grec de la gauche “AVGI”. Refa’t as-Sa’eed, militant historique de la gauche, actuellement sénateur égyptien, parle des dernières évolutions nationales et du mouvement de la gauche en Egypte.

Comment l’Egypte, alors qu’elle se battait pour la démocratie et les droits Humains, s’est - elle retrouvée actuellement dans la situation de mener la bataille contre l’anachronisme islamiste et la perspective d’une République islamique ? Quel rôle ont joué les Américains dans les décisions du président Moursi ?

Depuis le début existait une certaine coalition entre le CSFA (Conseil Suprême des Forces Armées) et la Confrérie des Frères musulmans. Tout le monde le sait. Nous avons été les premiers à demander une nouvelle constitution. Ils l’ont refusé. Ils se dirigent actuellement vers l’impasse, soutenus par des Etats comme le Qatar et la Turquie. Même le résultat des élections a été influencé par la participation de ces trois pays. Les USA ont une grande influence en Egypte, le Qatar dispose de beaucoup d’argent, et la Turquie se présente comme l’héritière de l’Empire Ottoman. Et ceci, malgré le fait que les Egyptiens haïssent les Ottomans, parce qu’ils ont souffert de leur domination. Tous ces facteurs ont négativement interféré avec la préparation du premier Referendum, les élections pour le Parlement…. Ils ont donné beaucoup d’argent et fourni d’importantes sources de financement.

Votre allocution à la conférence avait comme thème : « le 25 janvier : Un printemps spontané, suivi par un automne prolongé ». Pour quelles raisons avez-vous choisi ce titre ?

Du fait que le printemps a disparu immédiatement, et s’est poursuivi par quelque chose que nous ne pouvons pas appeler « printemps ». Il s’agit d’un automne, peut être d’un hiver avec tempête. Mais indépendamment des appellations, je considère que la situation actuelle en Egypte est très difficile. Les Frères Musulmans ont l’avantage de l’initiative politique et même la possibilité de quelques actions illégales durant les élections. En outre le vote lors des dernières élections récentes n’était pas positif. C’était un vote de négation. Plusieurs personnes ont voté pour Moursi parce qu’ils ne voulaient pas Chafiq. D’autres ont voté Chafiq par opposition à Moursi. Précisément à cause de ce fait, la situation est extrêmement critique et je crains qu’elle ne le devienne davantage.

Comment se présente la situation sociale et politique en Egypte, après le renversement de Moubarak en février passé, et jusqu’à aujourd’hui ?

La situation est criante. Nous ne pouvons pas parler de normalisations. Nous n’avons ni sécurité, ni construction économique, ni stabilité ; Ni même…logique. Ni une approche de programme ou de la manière dont doivent être prises des décisions.

Actuellement quelles forces constituent l’opposition ?

Nous avons unifié toutes les forces. Leur nom est “Front National du Salut”. Ce Front rassemble tous les partis laïcs, toutes les personnalités de l’Etat laïc, des organisations non gouvernementales (ONG) et des groupes de la jeunesse. Il s’agit d’un Front puissant, qui rassemble des centaines de milliers de personnes. Ainsi nous pouvons équilibrer la situation par rapport a la coalition des Frères Musulmans, du parti Al Nour des Salafistes, de la Djamaa Islamiya et autres.

Dans quelle situation se trouve actuellement la Gauche égyptienne ? Quelles approches et quelles tendances s’expriment en son sein ?

La Gauche égyptienne était habituellement divisée. Nous sommes tous d’accord sur le vrai problème réel, pour ce qui est de l’ennemi, tous nous nous accordons pour ce qui est de l’avenir, mais pour ce qui est du temps intermédiaire, nous avons plusieurs difficultés. Nous avons le Parti Communiste, et notre Parti, le “Taggamoo”, est considéré comme la force principale. Il y a aussi un petit parti la “Coalition Socialiste Populaire” (“Alliance démocratique socialiste”). Il existe aussi le parti de la “Rénovation Socialiste”, considéré comme trotskiste.

Quelles sont les différences entre les islamistes ? Dans quelles formes se renforcent mutuellement les deux principales tendances islamistes ?

Il existe une opposition interne entre eux, mais il y a aussi entre eux une coopération mutuelle. En ce moment les Salafistes appuient pleinement Moursi, même si ce dernier n’applique pas la charia. Les Salafistes se solidarisent avec le président et ainsi la société se divise. D’un cote les « islamistes » et de l’autre tous les autres : libéraux, démocrates, socialistes, de gauche.

Quel a été le rôle de l’armée durant cette dernière année et comment pensez- vous qu’elle réagira à l’ avenir ?

L’armée est une institution qui est entourée de respect. Les gens sympathisent avec l’armée égyptienne. Elle a gagné la victoire d’Octobre. Les meilleurs hôpitaux ont été construits par l’armée. Les meilleures routes ont été faites par l’armée. Les meilleurs terres et fermes agricoles appartiennent a l’armée. Les meilleurs ponts ont été bâtis par l’armée. Ainsi les gens, à chaque fois qu’il y a une crise, exigent de l’armée qu’elle participe à son dénouement. La force immobile le CSFA, a gouverné l’Egypte durant une longue période, mais il faut souligner qu’il a échoué. Peut être il s’agissait d’un échec technique. Ils ne savent pas comment gérer les problèmes. En même temps ils ont échoué dans la création de relations, de relations d’égalité, avec d’autres composantes, parce qu’ils faisaient preuve de préjugés favorables dans leurs relations avec les Frères Musulmans. Nous les avons mis en garde sur leur coopération avec les Frères musulmans, mais ils ne nous ont pas écoutés. Ainsi, je pense que maintenant Moursi, a l’occasion de limiter le rôle de l’armée. Pour cette raison l’armée réessaye maintenant de jouer un certain rôle.

Comment se présentait la situation a l’époque de Nasser et quelles furent les transformations après, depuis Sadate jusqu’à et y compris Moubarak ?

Sous la gouvernance de Nasser, il n’y avait pas du tout de démocratie. Il y avait des réalisations, des réalisations positives, mais pas de démocratie. Sadate, lui, « jouait » avec la démocratie. Il voulait la démocratie sous contrôle. Moubarak était fier de constater qu’aucune critique ne pointait dans la vie publique. Il avait donné une certaine liberté a la Presse, pour des bulletins de presse, pour des rassemblements, des manifestations, en pensant que rien de grave ne pouvait arriver, puisqu’il s’agissait « d’un jeu d’enfants ». Pourtant après un tel jeu il fut destitué du pouvoir…

Quelle fut la place des chrétiens Coptes, des femmes, des minorités au pays ? Quelles mutations s’observent, à leur égard, dans la période actuelle ?

D’après les islamistes, il n’y a pas de droits reconnus aux femmes et aux enfants. Ils ne reconnaissent pas des droits pour les Coptes. Ce sont les "coulisses" (hors la scène centrale). Mais leur réelle tactique consiste à promettre aux intéressés qu’ils inaugureront des pourparlers avec eux (promesses de négociations à venir), alors qu’ils n’ont encore jamais posé sur la table un projet d’étude pour la Constitution. C’est pour cette raison que les trois Eglises, l’orthodoxe, la catholique et l’anglicane, se sont retirées des discussions. De plus les femmes s’opposent a ce que nous appelons une « Constitution islamisée extrémiste ». Voila le problème de fond.


Refa’t as-Sa’eed est né en 1932 en Egypte. Dès l’âge de ses 14 ans il intègre le Mouvement Démocratique de Libération Nationale. Il a affronté depuis 1948 et jusqu’à 1977 des persécutions et emprisonnements continus. Sadate l’a considéré comme le responsable principal du soulèvement de 1977. Ses études juridiques ont été achevées tardivement, en 1971, alors que ses propositions pour un doctorat en Egypte lui étaient refusées, parce qu’orientées vers le respect des droits politiques. Ainsi, il a été admis a l’Université Karl Marx de Leipzig, où il a étudié l’histoire du mouvement communiste en Egypte, le problème Palestinien etc. En Grèce, a été publié son livre « Le Marxisme du Futur » édité par la maison d’Edition « Hérodote », (Grèce) avec une préface du professeur J. Mazis.

Traduction du grec : Aliki Papadomichelaki


entretien paru sous le titre :
Refa’t as-Sa’eed : "Όλοι μαζί μέχρι τον τελευταίο σταθμό" - le 16 décembre 2012 - traduction du grec par A.P.
http://www.avgi.gr/ArticleActionshow.action?articleID=736780


Voir en ligne : http://www.avgi.gr/ArticleActionsho...

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