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"TEMPS MORTS, BAIN MAURE"..., (A propos de RAYHANA et du film Les HORS LA LOI, par AREZKI METREF

lundi 4 octobre 2010



“À MON ÂGE, JE ME CACHE ENCORE POUR FUMER”
RAYHANA
PIÈCE DE THÉÂTRE

Coup de poing ! Cri du cœur.

Y a pas mieux qu’un hammam pour laver le linge sale, et pas forcément en famille.
La condition de la femme qui, en guise de changement s’aggrave, est « massée » au crible par une masseuse ne passant rien.

Nous sommes donc dans un hammam quelque part dans un pays miné par la violence. Tu ne sais pas trop où il se trouve, mais, même pas trop fortiche, tu as tout de même une petite idée. Va savoir pourquoi, elle te vient tout de go, cette petite idée ! Et si tu te disais que ça pourrait bien être l’Algérie, ce ne serait pas étonnant du tout !
Louisa, Aïcha, Latifa, Nadia, Fatima causent.
L’ordinaire est d’attentats, de viols, d’enlèvements, de tortures. Comme toujours en pareil cas, les femmes sont les premières à raquer. Réduites au silence et à la soumission, partout, elles se lâchent in situ.
On avait bien eu un avant-goût de cette atmosphère avec Halfaouine, le film du réalisateur tunisien Férid Boughedir. Mais à côté de cette pièce, c’est de la gnognotte !
Ici, le franc-parler parle si vrai qu’il en atteint des sommets. La montée de l’intégrisme, les femmes la sentent dans leur corps. Objet du désir, objet du délit. Fatima, la masseuse qui en a vu de toutes les couleurs, résume : « Toi, t’es une bâchée et toi une décapotable, bonnes à (..) toutes les deux. »
Dans cette pièce enveloppée de buée diaphane, la dramaturge fait dialoguer cru ses personnages. Le spectre est large. Ça va de la jeune romantique qui attend et espère l’amour de sa vie à la vieille demi-bourgeoise traquant le dentier de son mari. On passe par l’enseignante stérile, la jeunette enceinte du saint esprit, la voilée intégrale, etc.
Une typologie de femmes différentes réunies, voire unies par leur commune condition.

C’est le message de Rayhana. Féministe ? Doublement coupable !
L’infantilisation de la femme n’a d’égale, sur l’autre versant, que son habileté à passer les lignes de défense.


Rayhana a subi une agression au mois de janvier. Un type l’accoste, lui asperge le visage d’essence et lui jette une cigarette qui a la bonne idée de ne rien enflammer. Rayhana fracasse, avec cette pièce, le blockhaus contenant des années d’humiliations subies par les femmes. Mais ça continue. Respect !

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HORS LA LOI
de RACHID BOUCHAREB

Beau spectacle qui réconcilie avec le militantisme et réhabilite l’idée de sacrifice patriotique.
De ce point de vue, le personnage d’Abdelkader est fort. Et il réconcilie avec le cinéma aussi !
Outre l’interprétation admirable des principaux rôles mais aussi des autres (Chafia Boudraâ et Ahmed Benaïssa, sublimes dans les rôles du père et de la mère), le rythme du film en fait l’un de ces produits à la Hollywood pas désagréable.

On ne comprend pas la polémique lancée par un député UMP, sauf à l’envisager sous l’angle d’une volonté de révisionnisme.

Le peu que le film montre des massacres du 8 Mai 1945 est bien en deçà de l’horreur de la réalité.

Par contre, le film n’élude pas l’ambiguïté du mouvement national, les affrontements fratricides FLN-MNA, l’usage de la contrainte et même du meurtre pratiqué par le FLN pour mobiliser l’immigration. Critique facile à décocher aujourd’hui. C’était autre chose à l’époque, pour sûr !


Une belle leçon de nuance, voire de rendu de complexité...

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Voir en ligne : http://www.lesoirdalgerie.com/artic...