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PROCHE et MOYEN ORIENT : LETTRE DES 19 ex-RESPONSABLES POLITIQUES DEMANDANT À L’UE DE MODIFIER TRES SIGNIFICATIVEMENT SA POSITION -

jeudi 25 avril 2013

Le groupe européen d’éminentes personnalités
dans une lettre ouverte à la haute instance de l’Union Européenne
appelle à la relance du processus de paix au Moyen-Orient

LE PROCESSUS DE PAIX AU MOYEN-ORIENT

Madame la Haut Représentante ?

Nous, soussignés, membres du Groupe des Personnalités Eminentes Européennes sur le Processus de Paix au Moyen-Orient, vous écrivons pour vous exprimer notre vive inquiétude quant aux chances moribondes d’un règlement fondé sur deux deux états indépendants, souverains et pacifiques d’Israël et de Palestine.

Le Groupe des Personnalités Eminentes est composé de plusieurs anciens Présidents, Premiers Ministres, Ministres et hauts responsables des Etats-Membres de l’UE qui ont décidé d’accorder leur efforts pour encourager un règlement durable du conflit israélo-palestinien.

Nous avons observé avec une déception croissante au cours des cinq années passées l’échec des parties à entamer quelque espèce de discussion et celui de la communauté internationale sous la conduite des Américains ou des Européens à encourager une telle discussion. Nous avons aussi noté avec frustration et une profonde inquiétude la dégradation des conditions d’application des droits humanitaires et humains de la population des Territoires Occupés. La sécurité et la stabilité à long terme d’Israël, un objectif essentiel pour tout processus, ne peuvent pas être assurés dans de telles conditions, pas plus que les droit légitimes et les intérêts du peuple palestinien.

Le Président Obama a formulé certains de ces points pendant son passage de mars 2013 dans la région, particulièrement dans son discours au peuple israélien, mais il n’a fait preuve d’aucune intention d’agir pour briser la profonde stagnation, ni d’aucun signe qu’il recherchait quelque chose d’autre que le redémarrage de négociations entre les dirigeants de Cisjordanie et d’Israël dans le cadre du Processus d’Oslo, qui a perdu son élan depuis longtemps.

En conséquence, nous en appelons à vous, et par votre intermédiaire, aux membres du Conseil des Ministres, pour reconnaître que le Processus de Paix tel que conçu dans l’Accord d’Oslo n’a plus rien à offrir. Cependant l’actuelle impasse politique, tandis que la situation se dégrade sur le terrain, est insoutenable, étant donné les politiques inquiétantes dans la région et l’amertume générée par les dures conditions de vie sous l’occupation.

L’inquiétude de l’Union européenne devant cette dégradation, clairement exprimée dans toute une série de déclarations, ne serait-ce que les Conclusions du Conseil Européen du 14 mai 2012, n’a pas été compensée par une quelconque action susceptible d’améliorer la situation. Les aspirations des Palestinien et des Israéliens et les intérêts de l’Union Européenne auxquelles se réfèrent de façon évidente ces Conclusions et d’autres documents pertinents de l’UE ne peuvent être satisfaites par la stagnation actuelle.

Il est temps d’avertir fortement que l’Occupation est actuellement en train d’être consolidée par l’actuelle politique occidentale. L’ Autorité Palestinienne ne peut pas survivre sans s’appuyer sur l’aide de la sécurité israélienne et le financement occidental, puisque l’AP offre peu d’espoir de progrès en direction de l’auto-détermination pour le peuple palestinien, elle est en train de perdre rapidement le respect et le soutien de ses citoyens.
L’accroissement continu de l’étendue et de la population des colonies israéliennes, y compris à Jérusalem-Est, et le renforcement du contrôle israélien sur les TO au mépris du droit international, montrent une tendance permanente à la dislocation complète des droits territoriaux palestiniens.

Nous sommes arrivés à la conclusion qu’il doit y avoir une nouvelle approche. Laisser la situation se maintenir sans rechercher de solution est hautement dangereux quand une question si explosive se pose dans un environnement si tumultueux.

Une politique réaliste, néanmoins active, située dans le contexte des évènements actuels dans la région, a besoin d’être composée des éléments suivants :

  • une meilleure prise en compte du besoin essentiel d’une solution à deux états, comme le dénouement le plus susceptible d’offrir une paix durable et la sécurité pour les partis et leurs voisins et la seule reconnue comme juste et équitable par les résolutions de l’ONU ;
  • une reconnaissance explicite que le statut actuel des Territoires Palestiniens est un statut d’occupation, avec la responsabilité de leur situation tombant de par le droit international sur l’état occupant ;
  • une insistance sur le fait que les colonies israéliennes au-delà des lignes de démarcation de 1967 sont illégales, doivent cesser d’être agrandies et ne seront pas reconnues comme un des points de départ dans toute nouvelle négociation ;
  • une stipulation que toute organisation politique représentative demandant de façon valable à participer aux négociations doit renoncer à l’usage de la violence en dehors des normes établies par l’ONU ;
  • un renouvellement des efforts pour établir une représentation unifiée des deux territoires de Cisjordanie et Gaza, sans laquelle une paix d’ensemble ne peut pas être négociée avec succès et dont l’absence sert d’excuse à l’inaction ;
  • un encouragement à la réforme de l’Organisation de Libération de la Palestine, comprenant une représentation de tous les principaux partis s’engageant à la non-violence et reflétant les souhaits formulés par la population palestinienne habitant en Cisjordanie et à Gaza ;
  • un programme international ambitieux pour la mise en œuvre de conditions nettement améliorées de l’application des droits humanitaires et humains à la fois à Gaza et en Cisjordanie, sous le contrôle de l’Organisation des Nations Unies, quel que puisse être l’état des négociations de paix à n’importe quel moment ;
  • un réexamen des dispositions de financement pour la Palestine, afin d’éviter la dépendance actuelle de l’Autorité Palestinienne de sources de financement qui servent plutôt à geler qu’à promouvoir le processus de paix ;
  • un effort clair et concerté pour aller à l’encontre de l’effacement des lignes de démarcation de 1967 comme base d’une configuration à deux états. Cela devrait inclure une distinction claire dans les relations de l’UE avec Israël entre ce qui est légitime –à l’intérieur des lignes de démarcation de 1967- et ce qui est une violation du droit international dans les Territoires Occupés ;
  • une volonté plus claire au sein de l’UE de jouer un rôle politique et pas seulement financier et de reprendre un dialogue plus stratégique avec les Palestiniens.

En raison de la sagesse des déclarations de l’UE sur cette question au fil des ans, l’inactivité de l’UE devant une stagnation devenant de plus en plus dangereuse est à la fois immorale et imprudente. Les dirigeants européens ne peuvent pas toujours attendre une action de la part des Etats-Unis quand les preuves s’accumulent de l’échec américain à reconnaître et à favoriser un statut égal des Israéliens et des Palestiniens dans la recherche d’un règlement, tel qu’agréé dans les résolutions de l’ONU.

Les générations futures considéreront comme impardonnable le fait que les Européens non seulement aient permis à la situation d’évoluer vers ce point de tension aigue, mais aussi qu’ils n’aient pas agi maintenant pour remédier à la poursuite de la destruction des droits du peuple palestinien à l’auto-détermination. Nous considérons comme essentiel pour les intérêts de l’UE que le Conseil des Ministres et vous-même agissiez rapidement pour corriger cet état de fait inacceptable.

Nous envoyons des copies de cette lettre aux Membres du Conseil des Ministres et au Secrétaire d’Etat des USA.

Les membres du GPEE vous adresse ses respectueuses salutations.

Ont signé

Guiliano Amato, Ancien Premier Ministre d’Italie
Frans Andriessen, Ancien Vice-Président de la Commission Européenne
_ Laurens Jan Brinkhorst, Ancien Vice-Premier Ministre des Pays-Bas
John Bruton, Ancien Premier Ministre d’Irlande
Benita Ferrero-Waldner, Ancienne Commissaire Européenne et Ancienne Ministre des Affaires Etrangères d’Autriche
Teresa Patricio Gouveia, Ancien Ministre des Affaires Etrangères du Portugal
Jeremy Greenstock, Ancien Ambassadeur du Royaume-Uni à l’Union Européenne et Vice-Président du GPEE
Lena Hjelm-Wallén, Ancienne Ministre des Affaires Etrangères et Premier Ministre Adjoint de Suède
Wolfgang Ischinger, Ancien Secrétaire d’Etat du Ministère Allemand des Affaires Etrangères et Co-Président du GPEE
Lionel Jospin, Ancien Premier Ministre de France
Miguel Moratinos, Ancien Ministre des Affaires Etrangères d’Espagne
Ruprecht Polenz, Ancien Président du Comité des Affaires Etrangères de la Diète Fédérale Allemande
Pierre Schori, Ancien Ministre Adjoint des Affaires Etrangères de Suède
Javier Solana, Ancien Haut Représentant et Ancien Secrétaire Général de l’OTAN
Peter Sutherland, Ancien Commissaire de l’UE et Directeur Général de l’OMC
Andreas van Agt, Ancien Premier Ministre des Pays Bas
Hans van den Broek, Ancien ministre des Affaires Etrangères des Pays Bas et Ancien Commissaire de l’UE aux Relations Extérieures
Hubert Védrine, Ancien Ministre des Affaires Etrangères de France et Co-Président du GPEE
_ Vaira Vike-Freiberga, Ancienne Présidente de Lettonie