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YAMINA MECHAKRA (1949-2013) - HOMMAGES - TÉMOIGNAGES

dimanche 26 mai 2013


YAMINA MECHARKA, REGRETS - par Arezki Metref - Le Soir d’Algérie
- 26 mai 2013 ;


Le SAMEDI CULTUREL N°19 DE ZAKAD consacré à Yamina Méchakra ;


UNE KATÉBIENNE NOUS QUITTE... - par Rachid Hamatou ;


Ils ont dit


Notes - Références [1]


YAMINA MECHARKA, REGRETS

par Arezki Metref
Le Soir d’Algérie
26 mai 2013

Le 10 avril dernier, je recevais un email d’une parente qui disait en substance : Yamina Mechakra est gravement malade. Elle est hospitalisée. Elle a besoin d’amitié, de solidarité, d’affection. Il ne faut pas attendre qu’elle décède pour les lui donner. C’est maintenant, tout de suite, tant qu’elle est encore en état de les recevoir !

Oui, c’est tout ce qu’on déteste : la compassion post-mortem, le concert du conclave des pleureuses, priver d’une datte quelqu’un de son vivant et, une fois parti, submerger sa tombe de régimes. Mais voilà qu’on se fait piéger par le temps qu’on ne maîtrise pas et qu’on finit par tomber dans ce qu’on abhorre !

Comme j’ai beaucoup d’admiration pour elle, et que j’ai eu l’occasion de le lui dire, j’ai été touché, très touché, ému d’apprendre que Yamina avait émis le souhait que je lui rende visite sur son lit d’hôpital. ça vient de Yamina Mechakra, la magicienne, la source d’eau cristalline, la poétesse aux semelles de vent ! Le message d’une proche de Yamina m’est parvenu à travers ma parente. Il disait que je pouvais « venir lui rendre visite, elle se rappelle de lui (moi) vaguement ».

Etant alors loin d’Alger, il n’était pas possible de réaliser ce vœu sur le champ. J’ai écrit à cette proche de Yamina que j’étais vraiment peiné de la savoir si malade, et surtout si isolée, si j’en crois les articles de presse. Des informations parues dans certains journaux faisaient état en effet de la solitude de Yamina. Si sa famille s’est, dans les limites de ses possibilités, bien occupée d’elle, Yamina n’a pas eu le privilège d’un Ouettar hospitalisé longtemps en France à l’aide évidemment d’une prise en charge. Mais elle, Yamina, même du temps de sa validité, avait refusé de s’expatrier. Elle faisait corps avec sa terre.

Spontanément, j’ai ajouté que Yamina souffre beaucoup, la sensibilité aiguë, mais n’est-ce pas l’apanage du génie ? Consolation ? Kateb Yacine a souffert, Issiakhem a souffert, Yamina souffre...

Je me rappellerai toujours d’elle comme d’une source d’irradiation. Là où elle se trouvait, une lumière brillait. Elle avait quelque chose de magnétique.

J’étais littéralement bouleversé de savoir qu’elle se portait si mal. Je demandai à sa proche d’être mon interprète auprès d’elle : « Dites-lui que nous l’aimons, Nous, la tribu, des hommes libres, la sienne— et que nous pensons à elle très fort. »

Je me promettais naturellement d’aller la voir dès que possible. Je reçus une réponse qui m’informait que l’état de santé de Yamina était au plus bas, son pronostic vital mauvais. Elle souffrait, depuis trois ans, d’une grave maladie. Elle avait alors été admise, sur intervention du ministère de la Culture, au service des urgences de l’hôpital de Kouba. Mais elle devait quitter ce service et comme il n’existe pas de « service pour prendre les patients en fin de vie, nous sommes pétrifiés devant le vide ».

Aller où ? Elle avait postulé à un logement AADL. La lettre de refus de l’administration lui parvint à un moment où elle se portait au plus mal et où elle devait, quittant l’hôpital, être quelque part recueillie. Motif de ce refus : Yamina Mechakra avait un logement à Meskiana, dans les Aurès. « Il est occupé par un cousin, ce qui fait un citoyen de moins demandeur de logement », m’écrivit avec bon sens sa proche. Elle poursuivait : « Je suis juste indignée par cet abus, sachant que cette série de textes cités péremptoirement sont appliqués abusivement ! Les cumulards de logements dans les grandes villes doivent être intouchables, et ne sont poursuivis et punis que les plus faibles ! Yamina ne peut se défendre, car extrêmement diminuée par deux maladies. » La décision de l’organisme s’appuyait sur une batterie de textes de loi qui, ma foi, ne sont pas mauvais s’ils étaient appliqués de la même façon pour tout le monde.
Ma correspondante précisait que Yamina « ne bénéficiera même pas de ce fameux logement, ses jours sont plus que comptés, mais que les actes abusifs et efficaces contre les plus faibles soient confondus et pointés du doigt ». C’était un de ses combats : défendre les plus faibles ! Comme Kateb Yacine !

Je me promettais de rendre publique cette nouvelle tant que Yamina était encore vivante. Mais des perturbations dans la sphère personnelle ont tout brouillé. Puis un jour, je reçois, glacé, ce message laconique : « Yamina Mechakra n’est plus, elle s’est éteinte ce matin à 7h 30, elle sera inhumée demain à 13h. »

Faire quoi, maintenant ? Un peu tard pour dire tout ça ? Sans doute ! Mais, disons-le, pour la mémoire de celle qui valait son pesant de poudre.

Et répétons lui, même un peu tard, que sa parole, ce cri, ce cantilène, ce thrène, ce chant général, cette chaîne de mots qui, par sa plume, nous vient du plus loin des femmes qui se battent et chantent, cette “Grotte éclatée” reste comme une brûlure vive et vivifiante sur la peau d’une littérature algérienne qui se couche de plus en plus devant le people et l’exotisme.
Yamina Mechakra est d’abord cette fillette sur la rétine de laquelle s’est gravée à tout jamais la souffrance d’un homme écartelé sur le canon d’un char de l’armée française, exposé dans la rue. Yamina Mechakra, enfant, a vu son père torturé, mourir… Souffrance qui se fera chair et qui deviendra un brandon, mot-brandon !

Psychiatre, Yamina Mechakra a vu au plus loin et au plus clair de ce pays.

Poétesse, ce qu’elle a écrit, ce qu’elle a crié, ne ressemble à rien d’autre de connu jusque-là.

Elle était peinée de savoir qu’on la classait dans le rayon littérature féminine algérienne, standardisée, normalisée et définie, contenue forcément à l’étroit dans un genre. Elle n’y avait absolument rien à voir !
Inclassable !

Peut-être, au fond, que nous ne la méritions pas, Yamina Mechakra ! Oui, nous ne la méritions pas, je crois.

A. M.

sources Le Soir d’"Algérie
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2013/05/26/article.php?sid=149351&cid=8

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par Abderrahmane Zakad – Urbaniste
Alger le 24 mai 2013


« Le temps a trop d’avance sur nous qui cherchons à nous réinventer » -
Yamina Méchakra – “La Grotte éclatée” – page 31 – édition ENAG – 2.000

Bien sur, nous sommes peinés quand nous perdons quelqu’un de cher. Nous étions préparés, la sachant malade. La perte de Yamina Méchakra fait partie de ces événements qui surviennent et qui provoquent de la douleur. Mais la vie continue et prenant exemple sur ceux et celles qui nous indiquent le chemin des certitudes.

Je rendais visite régulièrement à Yamina Méchakra. Elle était mal en point. La voir diminuée me perturbait.

Elle a édité Arris (éditions Marsa-2.000) alors que je déposais mon roman Trabendo qui paraitra en 2001 chez le même éditeur. J’ai eu à discuter avec elle sur ce travail difficile et prenant qu’est l’écriture d’un livre.

Femme d’une simplicité étonnante, elle n’avait aucune prétention et ne mesura pas son talent. Nous discutions avec passion de sciences sociales, de livres et surtout de notre peuple. Elle admirait Kateb Yacine mais de là à l’effacer pour la ranger dans ce courant que l’on nomme « écriture Katébienne », c’est la sortir de son propre champ littéraire et de ses propres sentiments !
Elle a conçu une œuvre intérieure à laquelle le monde extérieur finit par ressembler car les tragédies de la grotte et les péripéties indiquent la tourmente dans une écriture onirique.

Dès sa disparition, des textes qui ronronnent sont publiés ici et là dans les médias ou sur le web sans attendre que sa tombe soit fermée ou que les trois jours de deuils soient clos comme le veut nos traditions.
Ne fallait-il pas lui rendre hommage de son vivant, enferrés que nous sommes dans un isolement qui ne favorise ni les relations conviviales ni la promotion de la culture. Les cimetières semblent devenir le lieu des rencontres culturelles.

Femme sensible, elle avait une écriture à elle, accessible, et d’une esthétique poignante. Son talent était du à une richesse d’idées, une vaste imagination, de la subtilité dans ce qu’elle exprime et surtout un enracinement à sa terre. Elle a beaucoup écrit et certains de ses textes ont disparu dans les méandres de la malhonnêteté.

Yamina Méchakra a fait paraître « La Grotte éclatée » dont le titre original quelle avait mis était « Ma grotte et ma peine ».
Après lecture du manuscrit chez l’éditeur, un autre titre a été proposé par Marcel Bois, alors lecteur à la SNED en 1979. Ce titre a été pris dans une phrase (Je ne me souviens de rien…Notre grotte éclata…) – Enag- 2.000 – page 94.

Non ! Son écriture n’est pas « katébienne » comme tentent de nous le dire certains qui déjà veulent la catégoriser et l’enfermer dans le même linceul que Kateb Yacine. « Kateb et Isiakhem voyaient en elle une résurrection de la Kahina » lit-on dans un hommage, en mêlant Issiakhem dans la ‘chorba’ « katébienne » cuisinée par des critiques et des chercheurs qui vont au-delà des pensées de Kateb Yacine. C’est quoi cette démarche. Pourquoi cette publicité dans des circonstances où il faut de la retenue ?

Yamina était une femme tout simplement. Une femme de cœur qui avait son style, une façon de voir les choses, de les sentir et de nous les restituer. Pourquoi vouloir lui coller une filiation littéraire à Kateb Yacine et d’inventer des mots pompeux comme par exemple « Elle était une katébienne » ou encore « La grotte éclairée par Nedjma » (El Watan du 22.5.13). C’est quoi être « katébien » ?
C’était une femme qui valait son « pesant de poudre » mais son propre pesant pas comme reflet des autres et surtout pas comme reflet de ces deux hommes aussi prestigieux qu’ils le sont.
C’est faire injure aux femmes en général d’inférer leur valeur par rapport aux hommes et c’est se disqualifier que d’étendre aux arts et aux lettres ce sexisme honteux.
Elle le disait, elle l’écrivait, elle les aimait, les femmes comme elle respectait les hommes.

On le découvre dans “La Grotte éclatée”, l’œuvre élégiaque, comme dans “Arris” et si on n’a pas compris cela dans ses écrits, c’est qu’on n’a pas compris le message de Yamina.

Alors n’en faisons pas une icône, elle n’aurait pas aimé. L’a-t-on lu ? Lisez ses œuvres et vous découvrirez une personne d’une grande culture avec une sensibilité profonde, de l’humanisme et un style qui lui est propre qui n’a rien d’« une écriture katébienne », quel joli mot.
Veut-on encore inventer une marque de fabrique comme cette publicité des années 1980 « Elles sont nées chez nous ». Trop de gesticulations tuent la geste de Yamina Méchakra qu’on veut aussi en faire une Kéblouti afin de la figer dans le cercle des bonimenteurs et des courants passéistes.

Yamina est algérienne, femme moderne, d’une nouvelle génération et, quant au pays, nous l’avons tous en partage : « J’avais compris qu’il était grand temps de vivre, qu’un nom n’avait point d’importance. Des hommes s’étaient mis à effacer de leur sang toute la honte qui pesait sur l’histoire de mon pays pour recommencer une histoire plus juste, plus digne, plus humaine. » “La Grotte éclatée” – ENAG- page 29.

Par ailleurs, laissons en paix Kateb Yacine, qui n’a rien demandé et que l’on sort à la moindre occasion pour remplir les pages culturelles des médias quand on n’a rien à mettre. Que l’université l’étudie c’est une bonne chose mais n’en faisons pas « une star ». Il n’aurait pas aimé cela, Kateb, l’homme du théâtre populaire. Ne l’entendons-nous pas crier : "Arrêtez de parler de moi, trop, c’est trop".

Qu’est-ce ces intellectuels maladroits qui encerclent les cadavres et mettent les âmes en conserve ?
Et puis, qu’a fait notre génération hormis discourir, danser et boire sur les lauriers de l’indépendance pendant que les malins s’installaient au pouvoir pour le siècle en nous enfermant dans la cage aux oiseaux si ce n’étaient le mouvement berbère et les jeunes de 88 qui nous avaient libérés une seconde fois et sortir de la grotte.

Le seul horizon raisonnable qui nous reste consiste à trouver les moyens du dégagement, de l’échappée et de la réinvention en pleine conscience d’un pire prévisible.
Il s’agit de concevoir un ordre nouveau à partir de nos malheureuses expériences et de nos échecs. Et les mots sont inaptes à procéder au changement.

Le 8 mars 2013, à l’occasion de la journée de la femme, j’ai passé l’après-midi avec Yamina ainsi que sa grande sœur dans une résidence spécialisée à l’Hôpital Drid Hocine. Elle était malade car fragile comme le sont de nombreux artistes et écrivains ou comme tout un chacun pourrait l’être. C’est la destinée. Zahia Yahi, du ministère de la culture, s’occupait d’elle depuis 7 ans. Elle a beaucoup fait pour Yamina.

Originaire de Meskiana, inhibée par la culture du terroir et l’amour de son pays, je lui chantais les chansons qu’elle aimait.
J’ai refusé d’être interviewé, car il y a un temps pour les morts qu’il faut respecter et le temps de la vie.
Il y a des décalages flagrants entre ce que l’on publie dans les médias à chaque fois qu’un artiste ou qu’un intellectuel disparait et l’oubli ou la mise à l’écart de leur vivant.
Pourquoi n’avait-on pas parlé d’elle alors qu’elle était en maladie, pourquoi n’allait-on pas lui rendre visite hormis une poignée de fidèles.

Je n’ai pas voulu aller au cimetière. Je savais qu’il y aurait les habituels visiteurs de parade qui viendraient pour se montrer. J’évite les « djanazates » protocolaires qui se font dans les bousculades.
J’irai prier, seul, sur sa tombe quand le vent des hypocrisies aura passé.
Je lui chanterai sur sa tombe la chanson chaouie des Hracta et des A3mamra qu’elle aimait : « ekker thoura adhouguir » de Aissa el Djermouni (Lève-toi et partons). Mais partons dans le bon sens. Celui de l’éthique.

Abderrahmane Zakad
Urbaniste –
Alger le 24 mai 2013

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UNE KATÉBIENNE NOUS QUITTE...

par : Rachid Hamatou

“Je m’en allais vers Arris, les yeux fixés sur mes doigts qui, à l’horizon, se tressaient avec d’autres doigts pour ramasser les nuages du ciel et les presser sur une terre brisée d’oubli, enceinte d’un grain millénaire, parcheminé de routes lointaines pour que pousse le blé que nos ancêtres avaient promis”, écrivait Yamina Mechakra dans “La Grotte éclatée.”

Avant-hier, la nouvelle de la disparition de la romancière, fille de Meskiana, Yamina Mechakra, a eu certainement l’effet d’une bombe assourdissante dans le milieu journalistique, mais aussi littéraire de la capitale (Alger). [2]


Mais sans nul doute, la douloureuse information de sa disparition a été doublement ou triplement plus éprouvante dans son pays d’origine, les Aurès. Auteur d’un véritable chef-d’œuvre avec “La Grotte éclatée” (éditions Sned, Alger, 1979), et préfacé par Kateb Yacine, qui a accompagné Yamina Mechakra dans l’écriture de ce roman/récit par ses conseils et ses précieuses orientations.
Ils étaient nombreux à se pencher sur une œuvre qu’on n’arrivait pas à classer : roman, récit, nouvelle… “La Grotte éclatée”, à sa sortie, donnait un agréable fil à retordre aux lecteurs mais aussi aux critiques, qui dans leur quasi-majorité aimaient, lisaient et relisaient.
Une des dernières approches et tentatives de déchiffrage, qui est considérée comme une bonne tentative de cerner l’écriture mechakrienne (car elle existe !), nous vient de l’université de Batna (département des langues, 2012) où, à l’occasion d’un mémoire de fin d’études (“La quête identitaire et spéléologique de Yamina Mechakra”), Meriem Safia Gharib, deuxième année master littérature et civilisation étrangère, avait apporté de nouveaux éléments de lecture, notamment ceux relatifs au fait que l’écrivaine donnait l’impression de prendre un malin plaisir à codifier et rendre mystérieux son texte, à travers une écriture en rétrospective. Il est courant que les lecteurs “fuient” ce style d’écriture, mais avec Yamina et sa Grotte, “le compliqué devient plaisir”, déclare la jeune étudiante, qui, contactée par nos soins pour nous livrer ses impressions à l’annonce du décès de la fille de Meskiana, nous dit avec grande peine et tristesse :
“C’est la plus mauvais nouvelle que j’ai reçue depuis celle du décès de mon père il y a une dizaine d’années. Je ne connais pas Yamina Mechakra personnellement, mais à la lumière et à la lecture de son roman, j’ai l’impression de l’avoir connue depuis toujours. Lisez une seule fois La Grotte éclatée et vous deviendrez auressienne ou auressien par la couleur, le mot, la description. Un récit aussi profond que complexe.”
À propos du texte, notre interlocutrice nous dira : “Ce qui ressort est la force de l’auteur et son génie à mettre en valeur et donner de la voix à la littérature orale longtemps marginalisée, voire méprisée.”
Et de regretter : “J’aurais tant aimé que lors du dernier colloque sur la littérature maghrébine d’expression française, qu’on fasse un hommage de son vivant à Yamina Mechakra, mais il n’est pas trop tard pour que cette Chaouia jusqu’à l’os et Algérienne jusqu’au bout des ongles soit honorée.”

L’omniprésence de la mythologie berbère, le récit, le sacré et le profane, la fécondité, l’usage de la symbolique et de la parabole, ainsi que le subtil dosage de l’intertextualité donnent un caractère unique et particulier qui distingue l’écrit de Yamina Mechakra, auteur de “La Grotte éclatée” et Arris.

À l’annonce du décès de Yamina Mechakra, un ancien ami qui a connu et côtoyé la romancière, qui faisait des voyages à Batna, pour aller visiter le tombeau d’Imedghassen et Timgad, Ali Ben Belkacem, journaliste à Batna, nous a fait parvenir un courrier, comme contribution et témoignage en tant qu’ami :
“Le besoin de communiquer chez ma sœur Yamina n’a pas de limite, et son altruisme sont certainement les deux facteurs qui l’on dirigée vers l’expression littéraire.
Il y a toujours eu un nœud central dans les écrits de Yamina comme d’ailleurs chez Kateb, l’un s’appelle Nedjma l’autre Arris… un point de départ.
Elle était comme en transe lorsqu’elle affirma avec un grand élan de dignité qu’elle constatait déjà les signes ou prémices de l’avènement de cette révolution culturelle nationale se construire à Batna et Meskiana.
Il est vrai que l’atmosphère à cette époque était à l’activisme thématique et qualitatif, ce qui créa de l’optimisme et de l’espoir.
” Le mot qui revenait souvent dans la bouche de Yamina,
nous dit son ami, est “révolution culturelle”.

Elle ne l’a pas connue ni vue de son vivant, mais des jeunes, pleins de jeunes s’intéressent plus que jamais à son œuvre ; peut-être que le rêve aura lieu à titre posthume. Ce qui ne sera pas trop mal non plus !

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Ils ont dit


YASMINA KHADRA, ÉCRIVAIN :

“Dans notre pays, le génie ne brille pas,il brûle”.


“Pour moi, Yamina Mechakra incarne l’Algérie tombée en disgrâce. C’est avec une immense affliction que j’apprends sa disparition.
Elle m’a écrit il y a trois ans pour m’annoncer son admission à l’hôpital. Je l’avais tout de suite appelée. Sa voix au bout du fil me parvenait du bout de la nuit. Je lui avais envoyé un bouquet de fleurs et je lui avais promis de lui rendre visite. À l’hôpital on m’avait dit qu’elle était rentrée chez elle. Je n’ai pas réussi à obtenir son adresse.
J’avais tellement besoin de la rencontrer pour lui dire ce que “La Grotte éclatée” m’avait apporté. Un roman économe de ses moyens, mais d’une intensité troublante. Kateb Yacine avait salué en elle la force tranquille d’un talent sain et juste. Yamina fut une dame éclairée.

Mais dans notre pays, le génie ne brille pas, il brûle. Oubliée de tous, Yamina a vécu le naufrage auquel sont voués les consciences et les généreux chez nous. Aujourd’hui, elle repose dans nos mémoires sinistrées”.

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BENAMAR MEDIENE, UNIVERSITAIRE ET ÉCRIVAIN :

“Kateb, Issiakhem voyaient en elle une résurrection de la Kahina”

“Je suis navré d’apprendre le décès de Yamina Mechakra que j’ai rencontrée avec Kateb Yacine.
“La Grotte éclatée” a été pour moi un livre-coup de tonnerre, une introspection à vif dans l’inconscient des Algériens. Ce livre est un oued de feu écrit d’un seul souffle, comme si Yamina était dans l’urgence de dévoiler, de verbaliser ce qu’elle avait aperçu au fond de la grotte, là où gisent les secrets de l’être dans ses utopies et ses désespérances.
Kateb avait bien vu en Yamina une sœur siamoise avec laquelle il aurait escaladé le Djurdjura pour faire entendre le chœur fémininmasculin déclamant le retour des ancêtres et la déchéance des imposteurs, voleurs de symboles :
Yamina, archéologue de l’esprit, était une femme qui savait métamorphoser ses failles, sa timidité, son humilité dans l’attente d’une complicité avec celles et ceux qui œuvrent dans l’imaginaire et l’incarnent dans la parole et l’art.

Kateb, Issiakhem l’aimaient et voyaient en elle une résurrection de la Kahina.

L’absence d’Issiakhem, puis de Kateb, l’a rendu orpheline.
Que le silence est cruel, que le silence est injuste quand une âme si belle, quand une intelligence si vive, disparaît au fond de l’horizon sans recevoir quelques fleurs ou un signe de la main”.

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SAÏD YASSINE HANNACHI, DIRECTEUR DES ÉDITIONS MÉDIA-PLUS

“Sa disparition est une perte pour le monde de la littérature”

“Je n’ai pas eu l’honneur de connaître personnellement cette grande dame, sa disparition est une perte pour sa famille, pour nous, pour l’Algérie et pour le monde de la littérature.

Je me permets de partager ces quelques lignes contenues dans le livre “Les Belles algériennes” , confidences d’écrivaines, signé par Nassira Belloula et publié en 2006 par les éditions Média-Plus de Constantine.

‘J’écris avec mon cœur, mes viscères ; mes textes, en gestation, sont des accouchements douloureux’.
Yamina Mechakra disait : ‘les gens s’imaginent que je me suis tue. Or je n’ai cessé d’écrire,mais j’écris et je perds. Je n’ai pas la chance de Kateb Yacine qui a eu Jacqueline Arnaud qui a sauvé et fixé ses textes transhumants. J’ai commencé à écrire à neuf ans, un roman à douze ans (manuscrit illustré de ses propres dessins intitulé “Le Fils de qui ?” ) et j’ai publié à vingt-quatre ans.

Je viens de sauver “Arris” et je n’en ai publié qu’un dixième.
À l’origine, Arris fait 400 pages, et la mythologie d’Araki incluse dans le roman 120 pages
.

‘Une femme qui écrit vaut son pesant d’or’, disait d’elle Kateb Yacine en préfaçant “La Grotte éclatée” , écrit en 1973.
Il aura fallu le réécrire trois fois, trois versions, toutes lues par Kateb Yacine pour que Yamina Mechakra décide de le publier en 1979”.

S. K.

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[1

Sur le site

de “Algérie

Littérature Action”

“Marsa
Editions”

ARRIS,

Roman écrit

par Yamina Méchakra

http://marsa-algerielitterature.info/extraits-de-roman/100-yamina-mechakra-arris-roman.html

[2Hommage à l’écrivaine Yamina Mechakra : la Grotte éclairée par Nedjma

http://www.elwatan.com/culture/hommage-a-l-ecrivaine-yamina-mechakra-la-grotte-eclairee-par-nedjma-22-05-2013-214662_113.php


YAMINA MECHAKRA (1949-2013) - Une katébienne nous quitte…
Liberté
http://www.liberte-algerie.com/culture/une-katebienne-nous-quitte-yamina-mechakra-1949-2013-200203


TIMKARDHIT, Bibliothèque virtuelle de Kabylie

http://timkardhit.hautetfort.com/archive/2007/03/10/la-grotte-eclatee-yamina-mechakra.html


Yamina MECHAKRA

La Grotte Éclatée.

Alger : SNED. 1979

http://auresiennekahina.wordpress.com/2009/08/30/la-grotte-eclatee-yamina-mechakra/

Auressienne Kahina Tamazight
Awal am wuden n lbarud ma yerga ur d-yettrekkah" la parole est telle un coup du fusil, une fois sortie la balle ne revient jamais"


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